Jeudi 17/12/2020

L’ordonnance en date du 2 décembre dernier proroge les règles exceptionnelles mises en place le 25 mars 2020 sur les assemblées générales. Mais pas seulement. Son contenu a été adapté sur trois points afin de : 

  • Resserrer la possibilité d’organiser une assemblée générale à huis clos ;
  • Renforcer les droits des actionnaires lorsque ces dernières ont lieu à huis clos ;
  • Faciliter l’adoption à distance des décisions relevant de la compétence des assemblées.

Entretien avec Jean-Philippe Roulet, Directeur Contenus Gouvernance à Institut Français des Administrateurs (IFA)

  • Que retenir de cette nouvelle ordonnance ?  

– Les pouvoirs publics ont complété l’ordonnance du 25 mars dernier sur différents points intéressants, à commencer par les conditions pour tenir une assemblée générale (AG) à huis clos. Ils ont resserré cette possibilité. Cette fois, outre les mesures sanitaires interdisant à la date de convocation et de réunion, les rassemblements, il faudra que ces mesures soient telles que l’on ne puisse pas concrètement réunir physiquement les actionnaires. L’ordonnance anticipe la sortie de la situation sanitaire exceptionnelle. Elle rappelle le droit fondamental des actionnaires de se réunir, d’échanger, de débattre, de poser des questions, d’introduire, le cas échéant, des projets de résolutions, et, enfin, de voter physiquement dans un lieu fixé à l’avance. On s’en félicite. Les droits des actionnaires doivent être préservés même dans une situation exceptionnelle.

  • Très concrètement, qu’est-ce qui va changer en 2021 ? 

– Les pouvoirs publics ont appris de l’expérience 2020 et entendu certaines critiques formulées. Les assemblées générales 2021 des sociétés cotées doivent désormais être retransmises en direct. Les retardataires disposeront toujours de la possibilité de la regarder en différé.

Côté participation, les émetteurs vont devoir mettre en place un espace en ligne dédié qui recense les questions écrites reçues et les réponses apportées par le conseil. C’était déjà possible l’an dernier, mais pas toujours mis en œuvre à défaut de règles contraignantes.

Par ailleurs, face à l’incertitude qui demeure, l’ordonnance facilite le passage du présentiel au huis clos et inversement. Son application s’étend jusqu’au 1er avril, ce qui permet de donner un horizon pour la préparation des assemblées générales 2021 : arrêté des comptes en début d’année puis convocation de l’assemblée générale en mars… Ce régime d’exception pourrait même, par décret en Conseil d’État, s’appliquer jusqu’au 31 juillet maximum, soit la fin de la saison des assemblées générales. Les émetteurs ont ainsi à leur disposition de la flexibilité, de la visibilité. Ils peuvent se projeter.

« Nous attendons du décret des précisions sur la constitution du bureau »

 

  • Nous attendons encore le décret… 

– Sûrement une question de jours. Ce décret permettra de compléter l’ordonnance. Des précisions sur la constitution du bureau, le gardien du bon fonctionnement des débats des assemblées générales, pourraient être utiles.  En outre, si le cas des questions écrites a été réglé, d’autres sujets comme les propositions de résolution par les actionnaires tant en amont de l’AG qu’en séance, la qualité de l’information sur les modalités de vote en cas de huis clos, etc., paraissent pouvoir être améliorés.

  • À quoi devront ressembler les assemblées générales de demain ?

En 2020, l’assemblée à huis clos n’a pas permis de votes en direct, en séance, ni, à de rares exception près, de poser des questions en séance par voie électronique. Il y a un chantier à lancer, celui d’arriver à des votes électroniques pendant les assemblées générales. Il va falloir encore améliorer les technologies, la digitalisation des assemblées générales. Au-delà des votes, les plateformes mises en place vont devoir accueillir les questions écrites, des questions « orales », les réponses, les commentaires, le tout en direct.

Pour aller plus loin : Télécharger notre étude « Assembles générales 2021 : dialogue actionnarial »

Il faut bien le reconnaître, les circonstances exceptionnelles lors des AG 2020 nous ont fait énormément progresser et les entreprises ont fait preuve d’une réactivité et d’une créativité remarquables.  Ces circonstances exceptionnelles n’ont pas vocation à perdurer. Il va nous falloir revenir au présentiel et aux dispositions de droit commun du Code de commerce mais en s’appuyant sur cette expérience inédite. Il paraît nécessaire de faire évoluer le cadre juridique afin d’améliorer et d’enrichir la démocratie actionnariale et la qualité du dialogue entre les sociétés, notamment cotées, et leurs actionnaires et ce en s’appuyant sur les technologies digitales.

Propos recueillis par Beñat Caujolle

AG 2020, UNE EXPÉRIENCE RICHE D’ENSEIGNEMENTS

  • Audience cumulée multipliée par 4
  • 107 entreprises du SBF 120 ont tenu leurs AG 2020 à huis clos
  • 70 ont diffusé leurs AG en vidéo
  • Sur le CAC 40 : 41 questions écrites en 2020, contre 13 en 2019 (règles plus simples, pas d’accusé réception…)
  • 21 résolutions rejetées sur le SBF 120, soit nettement plus qu’en 2019

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